Quatre Indonésien·ne·s contre Holcim: Questions et réponses en lien avec la procédure juridique
Pourquoi les quatre plaignant·e·s ont-ils déposé une requête de conciliation ?
Afin de pouvoir saisir un tribunal civil en Suisse, les plaignant·e·s devaient déposer une requête de conciliation. Il s’agit de la première étape d’une procédure civile dans le système juridique suisse (cf. art. 197 ss de la Procédure civile suisse). Par cette étape procédurale obligatoire, la justice tente d’éviter les procès inutiles. Là ou le juge de paix cherche à trouver, avec les parties impliquées, une solution à l’amiable. En cas d’échec, les plaignant·e·s ont trois mois pour déposer plainte auprès d’un tribunal civil.
Pourquoi les quatre Indonésien·ne·s entreprennent-ils ces démarches en Suisse ?
La requête de conciliation a été déposée à Zoug, où se trouve le siège groupe Holcim. Des traités internationaux, que la Suisse a ratifiés, fixent le lieu où doit être déposée une plainte si la partie requérante et la partie défenderesse ne sont pas du même pays. Dans le cas d’une action en dommages et intérêts, la procédure doit être engagée dans le pays où la partie défenderesse est domiciliée ou dans celui où a eu lieu l’infraction. Cela découle de la Convention de Lugano (articles 2 et 5) et de la Loi fédérale sur le droit international privé (article 33 al. 2 et article 129 ss).
Les plaignant·e·s demandent à Holcim de réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 43 % d’ici 2030 et de 69 % d’ici 2040.
Que demandent les plaignant·e·s ?
La plaignante et les trois plaignants demandent à Holcim des réparations individuelles, une indemnisation pour la souffrance psychique endurée et une contribution aux mesures d’adaptation nécessaires sur l’île de Pari (la plantation de mangroves et la construction de brise-lames, les « bronjongs », pour protéger l’île). Le montant de leurs revendications s’élève à l’équivalent de CHF 3600 environ par personne.
Il est important de souligner que les plaignant·e·s ne demandent que 0,42 % des coûts réels pour les dommages subis et les mesures d’adaptation nécessaires, car, selon une étude du Climate Accountability Institute, Holcim serait responsable de 0,42 % de l’ensemble des émissions industrielles mondiales de CO2 depuis 1950.
Autre point essentiel, les plaignant·e·s demandent à Holcim de réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 43 % d’ici 2030 et de 69 % d’ici 2040. C’est là le seul moyen de prévenir des dommages bien plus graves pour les habitant·e·s de l’île de Pari, mais aussi pour les millions d’autres personnes qui vivent sur des îles ou dans des régions côtières de basse altitude.
Sur quelles données scientifiques les plaignant·e·s s’appuient-ils pour déterminer la contribution de Holcim aux changements climatiques ?
L’action est fondée sur diverses preuves et études scientifiques relatives aux causes et aux conséquences des changements climatiques ainsi qu’à la responsabilité de certains actrices et acteurs dans le réchauffement climatique. Ces documents comprennent, entre autres, les rapports du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat de l’ONU (notamment son sixième rapport d’évaluation) et une étude du Climate Accountability Institute portant sur la responsabilité historique de Holcim dans le réchauffement climatique. D’après cette étude, Holcim fait partie des 50 entreprises qui ont le plus contribué, à l’échelle mondiale, aux changements climatiques.
Pourquoi n’est-ce pas l’ensemble de la population de l’île de Pari qui intente une action contre Holcim ?
Les actions de masse n’existent pas en Suisse. Chaque personne lésée dans ses droits doit entreprendre sa propre procédure civile. Étant donné que les quatre plaignant·e·s ont été lésés par les mêmes événements et par le même auteur du dommage, ils ont déposé ensemble leurs requêtes.
Quelles sont les prochaines étapes ?
L’office de paix de Zoug, où se trouve le siège de Holcim, a invité les différentes parties à une audience de conciliation en octobre. Si aucun accord n’est trouvé à cette occasion, les plaignant·e·s peuvent, dans un délai de trois mois, déposer plainte auprès du tribunal civil de première instance de Zoug.